vendredi 14 décembre 2012

Case #14






14 comme le 14 juillet 2012.

Première Fête Nationale du nouveau Président français et de son nouveau gouvernement. Alors que la campagne présidentielle avait laissé entendre un projet de suppression du défilé militaire, le nouvel exécutif en a réaffirmé l'intérêt. Il est vrai que le Chef des Armées est lui-même officier de réserve, d'où sans doute ce grand respect pour l'Armée de sa patrie. On ne sait d'ailleurs pas si c'est ce sens militaire qui l'a amené à réintégrer la gendarmerie dans son service de sécurité ou si c'est juste par gratitude envers le garde républicain préposé à la portière après la passation de pouvoir (voir la Case #6). Toujours est-il que le Président a particulièrement apprécié la démonstration des forces armées, y compris la prestation des parachutistes venus, en fin de défilé, se poser au pied de la tribune officielle, et ce, même si l'un d'entre eux s'y est alors blessé au contact du sol. Blessure et embarras qui valurent à ce soldat la visite présidentielle et une chaleureuse poignée de main manifestement réconfortante. Sous d'autres régimes, c'était la cour martiale. Faisant allusion à d'autres régimes, il me vient une question. Tous les acteurs de ce défilé savent-ils ce qu'ils ont alors commémoré? Rien n'est moins sûr. J'ai d'ailleurs moi même longtemps fait fausse route en pensant qu'il s'agissait uniquement de célébrer le souvenir de la Fête de la Fédération, qui s'est déroulée le 14 juillet 1790, en point d'orgue des nombreuses festivités spontanées organisées à travers le pays. Fêter la fédération était alors une forme d'affirmation de la cohésion nationale, sans vouloir remettre en cause la fonction royale. C'était une manière de marquer l'entrée dans une nouvelle ère, plus harmonieuse et courtoise. Une façon d'affirmer que "Le changement, c'est maintenant", sentiment renforcé par la première représentation du drapeau de la toute récente République américaine, en dehors des Etats-Unis. Aussi, en 1880, le député Raspail, comme le boulevard, propose de retenir le 14 juillet comme date de la Fête Nationale. Seulement, l'Assemblée Nationale était nettement partagée, comme souvent sous cette III° République. Alors que des législateurs voulaient commémorer la prise de la Bastille, l'autre partie de la chambre, à part, voulait, elle, célébrer la Fête de la Fédération, considérant cet évènement plus consensuel face au souvenir sanglant de la chute de la prison royale. Finalement, les deux évènements furent reconnus, puisque la loi relative à la Fête Nationale en fixe la date au 14 juillet, sans y mentionner d'année de référence. Cet équilibre entre soucis de sédimentation de la société et souvenirs sanglants, est peut-être là la raison pour laquelle le boulevard Raspail est une artère à double sens de circulation. Si la France festoie nationalement en faisant défiler ses militaires au milieu de leurs concitoyens, la Belgique, qui célèbre sa Fête Nationale 7 jours plus tard, fait, elle, défiler sa population au milieu de ses militaires. Ceux-ci quadrillent les axes de la capitale où ils installent campements, stands et ateliers de démonstration et d'expérimentation dédiés à la population qui déambule au milieu d'expositions de matériels et de véhicules. Le tout dans une ambiance de kermesse fraternelle. Une proximité idéale pour maintenir le lien Armée-Nation. Seulement, si l'esprit festif et bon enfant y ressemble à celui du 14 juillet 1790, il est en revanche moins flagrant, outre-Quiévrain, qu'il soit question d'affirmation de la cohésion nationale.

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